Le lourd fracas du rien contre le rien
Ne provoque aucun son, aucune vibration,
Pas le moindre cho qui rsonnerait au
loin,
Mais qu'une pure indtermination.
Ce rien n'engendrerait ni mal, ni bien,
Ne possderait aucune volont d'orienter le
destin.
Comment expliquer ds lors cette lassitude humaine extrme,
Cette capitulation devant quelque chose qui ne saurait tre
d'elle-mme?
Le silence des hommes peut en masquer un autre,
Plus terrible encore: celui des aptres
Constatant impuissamment
malgr leur transe
Que leur source unique s'est tarie, mais pas leur dmence.
Qu' cela ne tienne, ils brandiront leurs
idoles
Par-dessus le nant que nul n'affectionne.
Ils prtendront alors que le vide est la vie
Et qu'elle rayonne
jusqu'ici...
... Qu'elle sme partout sens et prsence
De mme que prceptes, lois et obligations de repentance.
Il s'imposera
alors dans notre temps,
travers mille prtextes lancinants.
Ainsi retentira nouveau
Le mme et sinistre cho;
Le glas d'une
gnration
Enlise dans sa traitre satisfaction,
Prfrant la vie, la mort
Et y prcipitant tout son sort,
Rejetant au loin tout ce
qui pourrait tre
Impulsion de raison, de rvolte contre ces prtres.
Mais non, car aussi vrai que le temps s'coule
Le vide
avale tout ce que vers lui on refoule,
L'erreur se substitue la vrit
Et la peur, la pit.
La satisfaction nait du
mensonge,
Rejetant le vivant dans un songe,
Le rien dans le vivant
Et la vie dans le nant.
Gare celui qui s'insurgera
contre la tautologie.
Il devra alors affronter la presque toute-puissante folie
Qui, substitue chaque tre, agit
travers une
unique sentence que chaque bouche rugit:
" Monstre, tu n'es pas de ce monde!
Fuis loin de nous, toi et ton aura nausabonde
Ou
nous mettrons en acte notre hritage lgal
Et crverons ta putride peau de chacal. "
" Toi qui a os dfier notre normalit:
Nos
sens, notre esprit, et notre divinit;
Notre arrire-monde et notre infinit;
Nos dogmes nous ordonnent de t'excuter.
Nos oreilles
ne sont destines qu' entendre
Les murmures que nous fantasmons dans le silence et ses mandres
Mais en tout cas pas ta trop concrte
voix
Et les frissons qu'elle engendre, ce terrible effroi. "
Voil ainsi celui qui se rebelle contre l'ternel retour du
vide,
Ce gouffre abyssal qui rend l'ide mme de vie insipide,
Calomni, diffam, puis finalement condamn
Au sinistre et illgitime
exil des damns.
Contre ledit impie, leur tour, ils brandiront leurs idoles,
Pales reflets d'un au-del frivole,
Le condamnant
l'errance dans leur froide ncropole,
Et enchainant l'exclu sous sa noire coupole.
Inhumain, immonde, amoral, anormal,
Tatou
sur sa chair par une encre de matire fcale,
Rduit par essence au silence
Et par folie la violence.